
1/2 - L'après Covid-19: vers une relance verte?
50 nuances de vert
Alors que les modalités de la relance commencent à être débattues et que le « jour d’après » va être au cœur des réflexions dans les semaines et les mois à venir, une question est sur toutes les lèvres : la relance sera-t-elle verte ? Et si oui, de quelle nuance de vert ?Nous vous proposons ici un premier état des lieux des débats autour de « l’après écologique » en France.
Priorité à l’emploi
Dès le début de la crise sanitaire, le Gouvernement a énoncé sa priorité : la sauvegarde de l’emploi. Les premières mesures adoptées, notamment dans le cadre des 2 premiers PLFR, se sont efforcées de répondre à cet objectif prioritaire: fonds de solidarité, dispositif d’activité partielle, prêts garantis… Des aides ouvertes à tous les secteurs les plus touchés, quels que soient leurs engagements et leur impact sur le climat.
Des contreparties écologiques aux aides accordées par l’Etat ?
Les discussions du 2ème PLFR ont été l’occasion de mettre le sujet sur la table : faut-il exclure des dispositifs les secteurs les moins vertueux et conditionner l’octroi des aides à des engagements écologiques ? Réponse du Gouvernement et de Bruno Le Maire : « Nous ne laisserons pas de grandes entreprises stratégiques se faire racheter par des acteurs étrangers. Mais ce ne sera pas un chèque en blanc : ces entreprises devront retrouver à terme de la compétitivité et s’engager totalement pour une économie décarbonée ».
Cela s’est traduit, par le vote d’un amendement de la députée Bérangère Abba (LRM) précisant que l’Agence des participations de l’État veillera à ce que les entreprises bénéficiant des 20 milliards d’euros de crédits ouverts par le PLFR « intègrent pleinement et de manière exemplaire les objectifs de responsabilité sociale, sociétale et environnementale dans leur stratégie, notamment en matière de lutte contre le changement climatique ». Un autre amendement plus contraignant, porté par Matthieu Orphelin (L&T) et une quarantaine de députés (dont certains de la majorité), a en revanche été rejeté.
Le gouvernement maintient le cap sur la neutralité carbone
Passée cette première phase de sauvetage, les prochaines mesures devraient être consacrées à la reprise sur le moyen et le long termes. Les politiques publiques, seront, dans les mois à venir, tournées principalement vers la relance, pour permettre aux économies nationales de se relever et de faire face aux enjeux post-covid. Le mois d’avril a vu naître les premières déclarations et les premiers débats sur le caractère écologique de cette relance.
Dans leurs différentes allocutions, le chef de l’Etat comme les membres du gouvernement ont régulièrement mentionné la nécessité de ne pas renoncer aux engagements climatiques et environnementaux. Pour le Président de la République, « il nous faudra bâtir une stratégie où nous retrouverons le temps long, la possibilité de planifier, la sobriété carbone, la prévention, la résilience qui seules peuvent permettre de faire face aux crises à venir ».
Elisabeth Borne a également rappelé à plusieurs reprises que « l’ambition écologique du gouvernement restait intacte » et que le cap de la neutralité carbone en 2050 était maintenu. Le publication de la Stratégie nationale bas carbone et de la Programmation pluriannuelle de l’énergie mi-avril sont venu concrétiser cet engagement. Néanmoins, la ministre a ouvert la porte à des adaptations : « il faudra regarder, dans les prochains mois, comment réajuster les dispositifs, aux plans national et européen. ». Si le cap est maintenu, des déviations dans l’itinéraire ne sont pas à exclure…
C’est d’ailleurs ce que prônent plusieurs acteurs, dont le MEDEF qui a adressé au gouvernement une demande de moratoire sur certaines dispositions de la Loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire.
Un multiplication d’appels pour une relance verte
Dans l’attente d’en savoir plus sur les modalités de la relance, un certain nombre d’acteurs institutionnels militent pour le maintien des engagements pris avant la crise et pour des plans d’investissements ciblés vers la transition écologique. Nous avons dressé une liste (non exhaustive) d’initiatives pour un après écologique et durable :
- Le think tank I4CE propose 30 mesures dans 7 secteurs couverts par la Stratégie nationale bas carbone ;
- Une cinquantaine de parlementaires lancent la plateforme collaborative Le Jour d’après, une consultation sur l’après-covid.
- Pétition pour « un jour d’après écologique, féministe et social », par 15 organisations (Attac, les Amis de la terre, la CGT, Greenpeace…).
- Des députés (pour beaucoup issus du collectif transpartisan « accélérons ») multiplient les tribunes et amendements pour défendre une relance durable. Parmi eux : Cédric Villani, Mathieu Orphelin, Barbara Pompili, Aurélien Taché, Jennifer De Temmerman…
- Les 150 citoyens de la Convention Citoyenne appellent dans une tribune à ce que « la sortie de crise ne soit pas réalisée au détriment du climat, de l’humain et de la biodiversité. » Ils ont choisi de transmettre au gouvernement et aux parlementaires 50 propositions issues de leurs travaux.
- EELV appelle à un Grenelle d’après-crise
- Le Haut Conseil pour le Climat publie dans un rapport spécial une série de recommandations pour que la France adopte un plan de relance compatible avec ses engagements climatiques
- LaREM dévoile les premières pistes de réflexions de son groupe de travail pour un « après écologique », piloté par les députés Bérangère Abba et Jean-Charles Colas-Roy.
En attendant que le Gouvernement ne se prononce les modalités de la relance, ce type d’initiative devrait continuer à se multiplier dans les semaines à venir.
Le débat sur la relance verte se poursuivra en parallèle au niveau européen, où l’avenir du Green Deal dans le contexte de crise est au cœur des discussions….